Les journées du patrimoine (page 3)

Publié le par chercheur d'histoires

Georges (Collection privée. Ne pas exploiter cette photo commercialement SVP)

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Les journées du patrimoine (page 3)

SVP Monsieur Jean-Yves KERZULLEC, racontez-nous la Belle Histoire que vous avez écrite sur notre ami Georges :

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« La liberté, Sancho, est un des dons les plus précieux que le ciel ait fait à l’homme. Rien ne peut l’égaler, ni les trésors que recèle la terre, ni ceux que dissimule la mer. Au nom de la liberté, tout comme nom de l’honneur risquer sa vie est une possibilité et un devoir ; à l’inverse, l’emprisonnement est le plus grand des maux qui puissent atteindre l’homme. »

Miguel de Cervantes (1547-1616), L’ingénieux hidalgo don Quichotte de la Manche, tome II (1615), chapitre 58.

Un artiste libre

« Un artiste libre n’admet pas de biographie ! » se répétait Georges O. sur son lit de souffrance, à l’hôpital Laënnec de Quimper. Il savait sa mort prochaine. Le printemps 2004 fleurissait de jaune la campagne bretonne.

 Georges O. aurait voulu jeter un voile sur son enfance mais il ne pouvait ôter de sa mémoire cette nuit de 1937 – il avait à peine 9 ans – quand son grand-père maternel, pépé Le Sellin, avait fait irruption dans sa chambre de Pont-Aven pour lui chuchoter, tremblant de chagrin : « Lève-toi, Georges… Suis-moi. Il va falloir te montrer courageux… Ta maman se meurt d’une leucémie… Viens lui dire adieu, vite ! ».

Il aurait préféré taire l’hiver 1938 passé dans la caserne de Montigny-lès-Metz où avait été muté son aviateur de père. La présence protectrice de « Vonnic », sa grande sœur, l’avait aidé à accepter la naissance de Paul, leur demi-frère, mais les constantes remontrances d’une belle-mère revêche l’avaient conduit au mutisme. Son père avait alors jugé préférable que les deux aînés retournent vivre dans la ville des meunières, au sein de la famille Le Sellin.

Georges se réfugiait dans le dessin. Lui seul savait que son maître d’école le félicitait régulièrement pour ses beaux croquis au crayon gris. Animaux et oiseaux se côtoyaient dans la pénombre des sous-bois qu’il aimait arpenter, solitaire, tandis qu’au loin tonnait le canon. Un coup de crayon précoce, servi d’un goût affirmé pour la peinture, avait ouvert au jour de ses dix-sept ans les portes de l’atelier parisien de Paul Colin, célèbre affichiste, peintre et graphiste de l’époque.

Georges passait sous silence ses frasques nocturnes dans le joyeux Saint-Germain de l’après-guerre. Avec Colin et ses camarades délurés, il avait été à bonne école, de jour comme de nuit, quatre ans durant. Puis, sagement, il était retourné à Pont-Aven vivre auprès des siens une bohème raisonnable.

Pendant deux ans, Georges avait fréquenté les ateliers de faïence de la manufacture Keraluc, à Quimper. En 1951, à la mort de ses oncle et tante, devenus ses parents adoptifs, il avait hérité d’un magasin au centre de Pont-Aven sitôt transformé en atelier de faïence. L’aspect éminemment technique de la céramique entravait sa soif de création car il ne dominait pas du tout cet art. Ce support ne parvenait pas encore à lui procurer la même satisfaction que le dessin sur papier. Chez Keraluc, il découvrit la liberté d’expression et d’expérimentation requise. Fort de cette technique désormais maîtrisée, il pouvait poursuivre en solitaire sa vie d’artiste libre.

 

A suivre demain

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